lundi 8 juin 2009

Y'a tué sa mère

Il y a de ces fois où l'on regarde un film et qu'on se sent étrangement interpellé par ce qu'on est en train de voir. Comme si l'oeuvre nous parlait directement. Mieux, même : comme si, à coups de nombreux parallèles, ça devenait un peu notre film. Ces cas, plutôt rares, sont généralement d'une puissance insoupçonnée, et c'est justement sous l'emprise de tels moments qu'on se rend compte que le cinéma est une forme d'art dotée d'une force inouïe.

C'est que, voyez-vous, je suis allé voir J'ai tué ma mère au cinéma vendredi. Je ne suis certainement pas critique de cinéma, je ne me risquerai donc pas à analyser les aspects techniques du film, mais je peux dire que ce que j'ai vu m'a profondément touché. Très profondément, même.



Premièrement, l'endroit où se déroule le récit se trouve à être l'endroit où j'ai grandi : un coin pas très reluisant de la déjà très peu reluisante ville de Longueuil. En un sens, le simple fait que l'action se situe dans cette banlieue typiquement ennuyante donne un ton assez morose, voire funeste, au film. Que ce soit juste ou non, il y a quelque chose de péjoratif qui est associé à la ville de Longueuil.

Ce qui m'a le plus frappé, par contre, et pas rien qu'un peu, est plutôt le récit lui-même. Le film raconte la vie plutôt banale d'une mère mono-parentale un peu quelconque et de son fils gai ayant une attitude plutôt rébarbative. En fait, c'est plutôt leur relation, l'archétype du concept amour / haine, qui est exposée. Les similitudes entre ce que je voyais à l'écran et ma propre expérience de vie m'ont renversées.

Je veux être clair : j'adore ma petite maman. Sincèrement. C'est une personne que je trouve tout à fait charmante et qui est profondément bonne. Ces choses, qui sont pour moi aujourd'hui évidentes et établies, je ne les voyais pas nécessairement lorsque j'étais sous l'influence de son autorité approximative. Notre relation n'a pas toujours été des plus reposantes. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'elle était aussi explosive que celle qui est dépeinte dans J'ai tué ma mère, mais tout de même.

Évidemment, étant transposée sur grand écran, la relation qu'entretiennent les deux protagonistes est forcément grossie, au même titre que leurs personnalités respectives. Nonobstant ces détails, j'aurais pu jurer voir, par moments, ma mère et moi, dans un passé pas si lointain.

Le personnage qu'interprète avec éclat Anne Dorval ressemble étrangement au personnage qu'est ma mère. Pétillante, distraite, simple et too much à la fois, nerveuse, authentique, aimante, généreuse, tourmentée à ses heures. Le personnage de Xavier Dolan reflète plutôt la réalité d'un jeune homme en (fin de) crise d'adolescence qui, comme tout adolescent qui se respecte, développe une force de caractère qui lui était auparavant inconnue. Cet esprit, tantôt caractériel, tantôt révolutionnaire, représente une étape de la vie à travers la majorité d'entre nous passerons avec plus ou moins de turbulences. Je me suis reconnu dans ce personnage, quoique le parallèle entre lui et moi est plus vague que celui entre Anne Dorval et ma mère.

Ce film m'a fait voyager dans mes souvenirs. Surtout à cause du personnage matriarcal, en lequel je voyais ma mère à moi, tellement aimante et déstabilisée, envers laquelle on ne peut resentir autre chose que l'empathie la plus sincère.

De plus, voir Anne Dorval péter les plombs est un plaisir que nul ne devrait se refuser. Je pense en particulier à un moment vers la fin du film où, étant excité par la montée d'adrénaline de cette fabuleuse comédienne, j'ai dû lutter contre une envie irrésistible d'applaudir à tout rompre tellement c'était savoureux.

Vous aurez compris, à la lecture des paragraphes précédents, que c'est un film que j'ai grandement apprécié et que je vous recommande donc. Seules ombres au tableau : comme tout bon film de répertoire, ça s'étire pendant un peu trop longtemps et la fin semble un peu botchée. Mais ça vaut vraiment la peine. Nous avons trouvé en Xavier Dolan un créateur qui est, malgré le fait qu'il se prenne vraiment au sérieux, très prometteur.

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